Communiqué commun sur les concours de recrutement des enseignants du second degré Communiqué commun

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Communiqué commun des Sociétés savantes représentatives des Historiens du Supérieur et du Secondaire au sujet des concours de recrutement des enseignants du second degré.

M. D. Bauduin, conseiller en charge des affaires pédagogiques auprès du Ministre J.-M. Blanquer a reçu à leur demande les représentants de la SoPHAU, la SHMESP, l’AHMUF, l’AHCESR et l’APHG, en visio-conférence, le mardi 20 avril à 16h [1]. Ont participé à l’entretien Mme Fl. Dubo (adjointe du directeur général des ressources humaines au Ministère de l’Education nationale), M. J. Hubac (sous-directeur de l’innovation, de la formation et des ressources à la direction générale de l’enseignement scolaire) et M. J. Grondeux (IG, doyen du groupe Histoire-Géographie).

Les sociétés représentées ont rappelé leur insatisfaction à ne voir entendue aucune des préconisations formulées dans les derniers mois. Soucieuses de l’équité de traitement des candidats sur tout le territoire national et inquiètes de l’attractivité déclinante du métier d’enseignant, préoccupées par la nécessité d’une formation intellectuelle exigeante pour les futurs professeurs d’histoire, dans un contexte où les usages publics de la discipline subissent de nombreux dévoiements, elles ont à nouveau formulé les principales observations et demandes suivantes :

1/ Evolution du concours :

• demande de sujets zéro pour les deux épreuves orales ;

• demande d’éclaircissements sur la nature des évaluations et composition du jury de l’épreuve 2 de l’oral (dont l’inclusion dans les épreuves théoriques du concours nous semble toujours hautement contestable) ;

• craintes d’une discrimination possible à l’oral, sur la base des informations du CV obligatoire à l’inscription, pour des candidats qui n’auraient pas suivi le master MEEF ni bénéficié d’un stage en établissement scolaire ;

• constat d’une impossibilité pour les candidats de préparer simultanément les deux concours de l’agrégation et du capes, et pour la majeure partie des universités d’en assurer la préparation de front, en raison de la désynchronisation opérée dans les programmes du capes et du refus de restaurer la présence égale dans les dits programmes des quatre périodes de l’Histoire ;

• inquiétudes sur la faible attractivité d’un concours dont les épreuves, au contenu de moins en moins scientifique et disciplinaire, deviennent de plus en plus confuses et qui offre pour perspective des rémunérations faibles ;

• rappel de nos propositions pour une 3e épreuve orale ou une épreuve orale 1 allongée, permettant de vérifier les compétences dans les deux disciplines (Histoire et Géographie).

2/ Lien entre concours, master MEEF et maquettes de formation :

• impossibilité de préparer des maquettes dans l’urgence et sans disposer de toutes les informations sur les épreuves orales du concours ;

• inégalité de traitement des futurs candidats entre ceux qui disposeront ou non de stages en alternance, ceux qui suivront les heures d’observation et de pratique accompagnée, ou ceux qui passeront en candidats libres ;

• incertitudes quant aux critères de sélection des candidats bénéficiaires d’un stage ;

• disponibilité réelle des tuteurs enseignants du secondaire qui doivent accueillir non les seuls reçus au concours mais les cohortes d’étudiants d’un master MEEF ;

• refus de certains INSPE d’envisager des passerelles entre master recherche et master MEEF, ce qui obligerait les candidats à se réinscrire pour deux années d’études (sujet commun au MESRI et au MEN).

Nos interlocuteurs ont apporté quelques éléments de réponse :

• Le nombre des places en stage est calculé nationalement, la répartition par disciplines se fera au plus près du terrain via les rectorats, les INSPE etc. Il pourrait y avoir des pénuries dans certaines disciplines (sans qu’on sache lesquelles), il est reconnu que l’année de transition 2021-2022 sera compliquée. Un groupe de travail y est consacré. Il a été cependant affirmé qu’une expérience d’enseignement dans le cadre des stages de master ne peut pas être un prérequis pour la réussite de la 2e épreuve orale.

• Le jury de l’oral 2 comportera forcément un membre « doté d’une compétence RH », le CV n’est pas l’objet d’une notation mais une grille d’évaluation RH est en cours d’élaboration via un groupe de travail (sans qu’elle soit pour l’heure disponible). Ce qui sera évalué sera la « capacité du candidat à se projeter dans le métier ». Les présidents de jury, dans chaque concours, auront une marge de manœuvre pour l’adapter. Les membres ayant compétence RH pourraient ne pas siéger pendant la totalité des sessions du concours ni dans toutes les commissions mais être remplacés. La complémentarité de compétence dans le jury de l’oral 2 est recherchée.

• Un autre groupe de travail piloté par deux IG historiens travaille à la publication pour septembre 2021 d’un code sur « L’idée républicaine », qui contiendra les pistes d’éléments attendus des candidats pour l’épreuve 2 à propos des valeurs de la laïcité et de leur pédagogie (le modèle d’un code élaboré en 2004 et réactualisé est mentionné).

• La question des passerelles entre Masters recherche et MEEF relève des établissements et du MESRI, même s’il y a quelques discussions impliquant le MEN (sans doute un autre groupe de travail ?).

• L’IG demande l’alignement des futures questions d’agrégation sur le calendrier du capes (et des programmes en lien avec le secondaire tant en histoire qu’en géographie) avec un rythme ternaire, et annonce pour le concours 2023 une question sur les villes et la construction de l’Etat qui couvrira en partie les périodes médiévale et moderne. Elle revendique l’alternance dans la présidence du jury d’agrégation (sans la concéder aucunement au jury de capes). L’IG réclame l’allongement systématique à deux années de préparation pour chaque question nouvelle, tout en expliquant que le programme peut être plus ramassé ou plus large que le programme d’agrégation.

Les représentants des Sociétés savantes ont constaté unanimement les très faibles échos donnés à leurs demandes : entre la surdité de l’inspection générale et le brouillard épais qui demeure à propos des aspects réglementaires du concours, il n’y a guère de place pour une approche concertée sur le recrutement des futurs enseignants du secondaire et pour les revendications sur lesquelles nous argumentons depuis plusieurs années quant à « l’armement intellectuel » [2] des futurs professeurs. La réforme va creuser les inégalités : territoriales entre les établissements ; sociales et économiques entre les étudiants.

Rien n’est assumé ouvertement quant à l’évolution vers une possible régionalisation des concours et le principal souci du MEN paraît être une reprise en main des concours par l’Inspection générale, avec le risque d’une mise au pas des disciplines porteuses des savoirs critiques, comme la nôtre. Les Sociétés ont exhorté leurs interlocuteurs à fournir au plus vite aux futurs candidats à un MEEF tous les éléments susceptibles d’éclairer leur choix. Elles ont expressément formulé le vœu que la Présidence du jury d’agrégation reste confiée à un Universitaire bénéficiant du crédit scientifique nécessaire comme de la confiance de ses pairs.

Judith BONNIN (AHCESR), Franck COLLARD (APHG), Nicolas LE ROUX (AHMUF), Sylvie PITTIA (SoPHAU), Dominique VALERIAN (SHMESP).

© Les services de la rédaction d’Historiens & Géographes - Tous droits réservés. 22/04/2021.

Ill. : Vue du Ministère de l’Education nationale. Photo APHG - DR. 2019.

Notes

[1Retenu par d’autres obligations, le conseiller est resté présent 30mn et le reste de l’entretien s’est poursuivi avec les autres interlocuteurs jusqu’à 17h15.

[2L’expression est volontairement empruntée au Ministre Blanquer, qui l’a en particulier utilisée au lendemain de l’attentat de Conflans.