Compte rendu 28e Conférence annuelle d’EuroClio (avril-mai 2022) Bologne et Ferrare, du 28 avril au 1er mai 2022

- [Télécharger l'article au format PDF]

Par Ann-Laure LIÉVAL et Sihem BELLA, pour l’APHG. [1]

Pour ses 30 ans, les membres de l’association EuroClio [2] se sont réunis à Bologne et à Ferrare du 28 avril au 1er mai 2022, pour une conférence annuelle guidée par une question à la fois vaste et primordiale - « what is history for ? ». Formée par un groupe de professeurs européens mais d’ampleur internationale, l’association promeut une manière d’enseigner l’histoire responsable et innovante, mettant au centre les thèmes de l’éducation à la citoyenneté, au patrimoine ou à la pensée critique.

Cherchant à croiser les points de vue au nom du principe de respect mutuel, elle encourage les débats autour des questions controversées dans un cadre démocratique. Ses membres cherchent à renforcer les liens entre l’histoire enseignée et la recherche, d’où la diversité des horizons dont proviennent ses membres. L’organisation de la conférence a été permise par le soutien de l’Union européenne et de l’Open Society Foundations General Support Grant.

L’ouverture de la conférence a d’abord été l’occasion d’exprimer la solidarité d’EuroClio avec le peuple ukrainien et avec nos collègues russes opposés à la guerre, rappelant l’importance de l’enseignement de l’histoire dans la compréhension des bouleversements qui agitent perpétuellement nos sociétés, qu’il s’agisse de l’irruption de la guerre en Europe, de la pandémie mondiale ou encore des enjeux du changement climatique. Depuis sa création, les missions de l’association demeurent inchangées : outre la vigilance devant la montée des nationalismes et l’attachement aux valeurs démocratiques, elle valorise la vision d’une histoire qui ne se répète pas mais qui permet de comprendre le monde, en se prémunissant des manipulations. C’est pourquoi, soutenant le rôle fondamental des professeurs d’histoire au sein des sociétés civiles, EuroClio cherche à accompagner les collègues portant des projets adoptant une perspective historique et correspondant aux missions qu’elle se donne.

Après la présentation du bureau renouvelé d’EuroClio par le président danois Lars Visti Hansen - dans les rangs duquel figure Ann-Laure Liéval qui représente l’APHG - une réflexion a été lancée sur le rôle des traces qui fondent les méthodes de notre discipline, sur les faits et la manière dont on les catégorise. Indispensable à convoquer avec les élèves, l’historiographie aide à déterminer non pas quoi penser mais comment penser, encourageant à une curiosité et une démarche critique. Occupant une place particulière pour EuroClio, l’intégration européenne était l’objet de la conférence plénière inaugurant la première journée : la nécessité de l’historiciser et de la placer dans une perspective diachronique est primordiale. De même, les usages publics de l’histoire et les politiques mémorielles européennes confirment la prépondérance de l’histoire et ses enjeux en matière de responsabilité politique. Depuis Bologne, premier foyer universitaire européen au XIe siècle, la conférence annuelle a consisté durant plusieurs jours en une alternance d’assemblées, d’ateliers, de débats, de lectures, d’échanges conviviaux et de discussions animées mettant l’enseignement de l’histoire et les élèves au cœur des préoccupations pédagogiques.

Outre les professeurs et chercheurs principalement européens, l’assemblée des participants était aussi constituée de quelques membres de fondations ou d’organisations. Par exemple, le Bulgare Nikolay Dunev, de l’Active historical map foundation, a présenté dans un atelier le site spatium.bg et l’intérêt de recourir à des cartes historiques interactives en classe ; le Polonais Jakub Mańczak du Pilecki Institute a quant à lui mis en valeur la postérité de Raphael Lemkin, juriste polonais resté dans les mémoires pour avoir forgé le terme de « génocide » et contribué à sa criminalisation par l’ONU. La lutte contre les discriminations associée au développement d’une culture démocratique chez les élèves est un autre exemple des sujets abordés pendant les ateliers. Présenté par Jadé Botha (EuroClio), Lidija Zupanic Suica (Education for the 21st Century) et Marie-Louise Jansen (Institute for Historical Justice Reconciliation), une discussion autour de l’initiative Contested Histories->https://contestedhistories.org] a permis d’évoquer les débats autour des monuments dédiés à des personnes ou à des événements controversés. Des centaines de cas sont répertoriés dans le monde entier : la place de ces monuments dans l’espace public et leur contestation devient incontournable dans nos enseignements. EuroClio cherche à poursuivre le développement de ses projets dans les années à venir ; ceux-ci ont impliqué plus de 25 000 professeurs d’histoire dans plus de 50 pays depuis la création de l’association.

EuroClio propose également plusieurs webinaires par an en anglais (du 25/07/2022 au 30/09/2022 sur l’Histoire à l’extérieur de la salle de classe), et régulièrement des appels à projets transnationaux, à articles, à ateliers afin de participer à des séminaires internationaux. Prochain rendez-vous proche de la France : le vendredi 30 septembre à la Maison de l’Histoire de l’Europe à Bruxelles pour « 𝗧𝗲𝗮𝗰𝗵𝗶𝗻𝗴 𝗘𝘂𝗿𝗼𝗽𝗲𝗮𝗻 𝗛𝗶𝘀𝘁𝗼𝗿𝘆 𝗶𝗻 𝘁𝗵𝗲 𝟮𝟭𝘀𝘁 𝗖𝗲𝗻𝘁𝘂𝗿𝘆 : 𝗙𝗶𝗻𝗮𝗹 𝗖𝗼𝗻𝗳𝗲𝗿𝗲𝗻𝗰𝗲 ».

Pour suivre les projets et travaux d’EuroClio : la page Facebook, le compte Twitter @EuroClio, l’inscription à l’infolettre que reçoit également l’APHG, en tant que membre d’EuroClio, mais aussi une chaîne YouTube, le podcast Past Times Talking and teaching History, et la plateforme de ressources pédagogiques Historiana.

© Les services de la Rédaction d’Historiens & Géographes, 11/08/2022. Tous droits réservés.

Notes

[1Représentantes de l’APHG, association membre et cofondatrice d’EuroClio, réseau des associations et des fédérations des professeurs d’histoire en Europe, lors de la 28e Conférence annuelle.