Chers collègues,
Nous (SHMESP, SOPHAU, APHG) venons vous informer et vous alerter sur les dangers imminents qui pèsent sur les études de l’Antiquité et du Moyen Âge tant dans l’Enseignement supérieur que dans l’Enseignement secondaire.
Le programme du concours du CAPES (2015) est à nouveau calqué sur celui de l’Agrégation mais est désormais organisé, pour ce qui concerne les épreuves d’Histoire, sur trois périodes et non plus quatre. Une modification apportée par arrêté du 19 avril 2013 a restructuré le périmètre scientifique du concours en excluant, pour l’instant, une période sur deux années.
En 2015-2016, il s’agira de l’histoire moderne. Malgré notre intervention auprès du Président du CAPES (Vincent Duclert), le 7 décembre 2013, et de Philippe Santana (adjoint à la directrice générale des Ressources humaines du ministère de l’Éducation nationale) que nous avions rencontré le 19 novembre 2013, la structure du concours n’est pas modifiée. Il va de soi que nous allons poursuivre la pression pour obtenir le retour aux quatre questions, c’est-à dire aux quatre périodes, fondement des études historiques à l’échelle internationale.
L’éviction de l’une des périodes est présentée par certains de nos interlocuteurs comme un allègement du concours pour des étudiants qui ne seraient plus en mesure de préparer un concours jugé difficile et incompréhensible.
Par ailleurs, la 23e section du CNU (Géographie physique, humaine, économique et régionale), l’une des deux sections, avec la 24e, regroupant les géographes a voté une motion dans laquelle elle exige le maintien des trois questions, la non-remise en cause de la bivalence et de la place de la géographie dans la préparation aux concours mais aussi dans l’enseignement. Si nous ne remettons pas en cause la bivalence et la place de la géographie dans la formation des étudiants et dans le métier d’enseignants, nous revendiquons par contre le caractère intangible de l’unité historique qui repose sur les quatre périodes.
Les raisons qui ont motivé cette motion cachent mal une contradiction de la part de nos collègues géographes. Ne doit-on pas constater d’une part que dans de nombreuses universités la préparation aux épreuves de géographie était/est faite dans les IUFM/ESPE par des PRAG, d’autre part que 90% des candidats au CAPES sont des historiens ? Or, la baisse constante des effectifs étudiants conduit nos collègues géographes à exiger une parité horaire qu’ils ne peuvent assurer en raison du désintérêt très large d’une partie de leur communauté pour les concours.
Enfin, cette attaque contre l’unité de l’histoire risque de connaître une nouvelle étape avec la rédaction des programmes qui doivent rentrer en vigueur en 2016. Nous savons que les Inspecteurs généraux de l’Éducation nationale ne sont pas en charge de la réflexion sur les programmes depuis la constitution par Vincent Peillon du Conseil supérieur des Programmes, institué par la loi pour la refondation de l’École du 8 juillet 2013. Le doyen de l’IGEN (histoire-géographie), François Louveaux, qui vient de démissionner et qui sera remplacé prochainement, nous a encouragés à contacter le nouvel IGEN, ce que nous ne manquerons pas de faire.
Nous allons également demander un rendez-vous avec le président du CSP, Alain Boissinot. La place de l’histoire de l’Antiquité et du Moyen Âge pourrait se voir contestée dans le cycle initial du collège.
Nos collègues du Comité français des études byzantinistes nous ont alertés sur le risque de fusion des deux périodes, ancienne et médiévale, en classe de sixième avec toutes les conséquences dramatiques que cela aurait sur les volumes horaires accordés à chaque thématique et la disparition programmée de très nombreux thèmes pourtant centraux pour notre culture. Il n’est pas évident que la place étique de l’Antiquité et du Moyen Âge au lycée soit maintenue. L’histoire moderne et l’histoire contemporaine seront également affectées, certes avec l’illusion d’avoir survécu mais au prix de tels redécoupages chronothématiques que des pans entiers ne seront plus traités. N’allons-nous pas droit vers un enseignement de géo-politique où les historiens traitant d’avant 1945 (version chronologique optimiste) ou d’avant 1989 (version qui finira par s’imposer) n’auront pas plus leur place.
Nos collègues du Secondaire, qui sont soumis à un éclatement de plus en plus prononcé de leurs activités d’enseignement et doivent assurer des missions de plus en plus diverses, se désolent de ce démantèlement et ne peuvent plus assurer sereinement la formation et la transmission des savoirs et des méthodes. Á notre tour, nous subissons une déstructuration de notre discipline, ce qui aura de nombreuses conséquences néfastes sur le plan académique et culturel.
7 mars 2014
Société des Historiens Médiévistes de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
Société des Professeurs d’Histoire Ancienne de l’Université.
Association des Professeurs d’Histoire et de Géographie.