Le schéma traditionnel dans une situation de conflit est la situation en « V », opposant des Victimes victorieuses aux Vilains vaincus.
Après les accords d’Oslo, il y eut des espoirs d’apaisement, et c’est dans ce contexte qu’en 2000 à Beit Jalah est née l’idée de créer un manuel d’histoire commun sous la direction du professeur Dan Bar On, Eyal Naveh et Sami Adwan.
Puis le rêve se brisa avec le regain de violence lié à la Seconde Intifada.
Plutôt que d’écrire un livre « commun », « partagé », l’équipe proposa alors de présenter face à face, côte à côte, deux versions d’une même histoire, et d’écrire un manuel à deux voix narratives.
L’équipe se compose d’un groupe de 12 enseignants du secondaire : 6 Israéliens, 6 Palestiniens.
Il a fallu bien sûr établir des règles de discussion afin de pouvoir travailler ensemble.
Le livre présente donc face à face la version israélienne et la version palestinienne d’une histoire commune et conflictuelle depuis la Déclaration Balfour jusqu’aux années 90, séparées par une colonne vierge qui reste à remplir, celle d’une version commune de cette histoire.
Ce livre fut un succès académique, et reçut rapidement un écho très favorable à l’extérieur de la région. Le livre a été traduit en six langues.
Mais c’est un échec localement : le livre est interdit dans le système secondaire par les deux gouvernements, et l’équipe reçut des sanctions administratives des deux côtés.
Cependant, il est utilisé dans l’enseignement supérieur en Israël où il suscite des réactions très positives des étudiants. Il permet de développer une nouvelle méthode d’enseignement, et surtout de constater l’écart dans les récits qui sont faits d’une même histoire, ce qui est déjà un premier pas.
© Ann-Laure Liéval [2] et les services de la Rédaction d’Historiens & Géographes - Tous droits réservés. 09/05/2018.