Le CNRD : quelques pistes de réflexion Textes et propositions

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Cette note a été remise par la délégation de l’APHG à la commission chargée de rénover le CNRD (Concours National de la Résistance et de la Déportation) le lundi 16 mars 2015 au Ministère de l’Education nationale : Jean-Yves DANIEL, Doyen des doyens de l’inspection générale, Hélène WAYSBORD-LOING, inspectrice générale Honoraire, Mme ANGLES, professeur d’Histoire et de Géographie et à Charles-Jacques MARTINETTI, chargé d’études « mémoire, histoire et citoyenneté » qui assistait à l’entretien (DGESCO).

Un texte détaillé est également disponible dans notre rubrique "Ressources APHG", en page adhérents.

A initiative du Président de la République, qui a évoqué dans son discours du 27 janvier au Mémorial de la Shoah le « renouvellement » du CNRD pour en assurer la « pérennité », une mission de réflexion a été constituée par la ministre de l’Education nationale et le secrétaire d’Etat aux Anciens Combattants.

L’APHG, partenaire constant du Concours aux niveaux national et départemental depuis 1964, qui siège au Jury national et dans les jurys académiques, souhaite être associée à cette réflexion, et propose d‘ores et déjà quelques pistes de réflexion dans les premier et second documents.

Créé en 1961, le CNRD a déjà connu nombre d’évolutions, tant dans sa nature que dans le contenu des épreuves ou dans la constitution des jurys. Centré initialement sur la Résistance intérieure et sur la déportation politique, il a progressivement intégré dans ses objets le système concentrationnaire nazi et la Shoah, tout comme la France Libre, et les différentes déclinaisons de la Résistance intérieure, dans sa composition (femmes, jeunes, étrangers, monde rural…) ou dans ses actions (maquis, presse clandestine, renseignement…).

La disparition progressive des acteurs et des témoins de l’époque fait qu’il n’est déjà plus depuis quelques années un « vecteur de transmission intergénérationnelle directe ». Il est devenu un « relais de mémoire », un outil original d’approche de l’histoire, et de formation à la citoyenneté par l’approche d’itinéraires de femmes et d’hommes engagés dans un combat commun au-delà de leurs divergences politiques et religieuses. Cette dimension va encore s’accentuer dans les prochaines années.

Voici quelques pistes de réflexion de notre Association :

I. Le concours doit rester ancré dans la séquence 1933-1945, de l’installation du IIIe Reich à la fin de la Deuxième guerre mondiale, avec sa triple dimension : Résistance(s) aux Nazis, leurs Alliés et leurs collaborateurs, connaissance du système concentrationnaire nazi, de son fonctionnement et de ses cibles, politique d‘extermination nazie.

Cet ancrage temporel, intégrant déjà une pluralité d’objets, demeure largement justifiée de plusieurs points de vue :

 La Résistance demeure un phénomène social et politique tout à fait particulier dans ses dimensions de volontariat (des combattants non requis par un Etat…) et d’engagement civique, d’invention de structures clandestines et dans ses préoccupations morales et sociales : notre monde contemporain lui doit beaucoup tant dans la reconfiguration des Etats (les Etats sociaux d’après 1945 en Europe occidentale), en particulier de la République française, que dans l’évolution du droit et des procédures judiciaires.

 Le système concentrationnaire nazi et la Shoah doivent être connus dans leurs dimensions spécifiques, ce qui semble plus nécessaire que jamais dans le contexte actuel où prolifèrent négationnismes et complotisme. Leur étude doit permettre aussi de faire le lien avec d’autres massacres et génocides antérieurs (Arménie…) ou postérieurs (Cambodge, Rwanda…)

II. C’est d’ailleurs le maintien de cet ancrage qui ouvre la possibilité, comme le pratiquent la plupart des musées et mémoriaux de la Résistance et de la déportation depuis plusieurs années (ainsi le Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon, ou le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère à Grenoble) de s’ouvrir sur la période d’après 1945, sur d’autres objets, tous associés cependant à la problématique Résistance(s) contre des régimes autoritaires ou totalitaires.

On peut ainsi envisager périodiquement (une année sur trois ?) de faire travailler et réfléchir les élèves sur des objets comme : le génocide rwandais, le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis dans les années 1960, la « dissidence » dans l’ex bloc soviétique, etc.. Pour chacun de ses thèmes, et sous des formes adaptées à l’âge des élèves, la dimension comparative avec la période de référence 1933-1945 devrait être introduite tant en ce qui concerne les résistances (armée, non violente…) que dans les systèmes répressifs.

III. Enfin la période de référence peut elle même intégrer une dimension européenne, concernant au moins les Etats de l’Union européenne, en particulier les pays voisins de la France (Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-uni…), souvent déjà associés dans des formes diverses de partenariat avec les établissements scolaires (voyages scolaires, échanges…) et leurs communes d’implantation (jumelages…).

Des sujets sur l’exil italien ou espagnol en France, sur l’arrivée en France d’opposants allemands au nazisme, ou sur la BBC en guerre et l’aide britannique à la résistance auraient toute leur place dans un concours reconfiguré mais fidèle à sa vocation et ses origines.

Le Concours permettrait ainsi d’articuler approche historique et formation à la citoyenneté française et à la citoyenneté européenne par la réflexion sur des combats et des valeurs français, européens et universels.

Paris, 16 mars 2015

La délégation de l’APHG chargée des propostions pour le CNRD (Aleth BRIAT, Françoise MARTIN, Franck SCHWAB, Hubert TISON, Gilles VERGNON).

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