Voici un livre original qui parle d’un sujet neuf, encore d’actualité et pour longtemps : la pollution des sols et des nappes phréatiques à la suite des bombardements d’artillerie, de l’emplacement d’usines de désobusage. Les terres bombardées sont impropres à la culture. Malheureusement, certaines ont été remises en culture. Les sols sont infectés par le perchlorate qui a été retrouvé dans l’eau du robinet au niveau des anciens champs de bataille de 14/18. La destruction et le recyclage de cet arsenal sont un héritage toxique centenaire. Daniel Hubé, géologue de métier, s’est livré à une enquête historique et environnementale pendant 5 ans, pour faire émerger du passé des questions enfouies. Il connaissait déjà un site où la Grande Guerre avait laissé dans le sol son empreinte chimique, « Place aux gaz », dans le nord du département de la Meuse en forêt de Spincourt, près de Verdun. Un universitaire allemand venu mesurer la qualité des sols, découvre des quantités gigantesques d’arsenic et des métaux lourds en 2007. Ce site a accueilli des opérations de destruction d’obus chimiques. Le sol est impropre à toute culture.
Daniel Hubé a eu recours pour son enquête à de multiples spécialistes, aux archives en France et à l’étranger, à des drones aussi pour dresser un état de la pollution de guerre et des désastres écologiques. Il a utilisé les deux bases de données concernant les sites pollués : le système Basias qui a recensé 400 000 sites indiquant des activités industrielles et artisanales ayant pu être à l’origine d’introduction dans les sols de substances polluantes et le logiciel Basol qui a regroupé près de 4 000 sites qui requièrent l’action des pouvoirs publics à titre préventif et curatif. Il fait comprendre comment ces substances chimiques posent un problème ou non pour l’environnement, l’eau souterraine, la santé humaine.
Il fait mention de catastrophes oubliées comme celle de l’explosion entre le 2 et le 3 février 1918, d’une usine de désobusage installée à Yzeure dans l’Allier. Il y avait là un stock de 3 millions d’obus chargés ou engins explosifs, 2 400 tonnes de poudre et d’explosifs. Elle employait 8 348 hommes et femmes dont des Kabyles, des Sénégalais et des Italiens. « La guerre de 14 nous, dit Jean Yves Le Naour, dans sa préface n’est pas finie… Elle ne fait que commencer ».
Au total un livre passionnant qui s’avérera être très utile pour mobiliser les populations directement exposés à la pollution chimique afin d’éliminer ces bombes à retardement.
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© Marcello Novari pour Historiens & Géographes - Tous droits réservés. 26/09/2016.