"Chers amis et collègues,
Pour répondre au souhait exprimé par notre président Bruno Benoit, à l’issue de l’Assemblée générale du 30 novembre au lycée Saint-Louis, de me proposer la rédaction d’une contribution à notre débat sensible sur la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple dans le cadre des commémorations de 14 / 18, je propose la publication, en Tribune libre dans le prochain Historiens & Géographes, de ce vœu émis pour 2015, par le maire de la ville de Dijon et adopté par la majorité de son Conseil municipal réuni en assemblée plénière.
Il m’apparaît comme répondant parfaitement aux diverses nuances des aspirations de nos collègues, tant de l’APHG que de toute la profession. La proposition de pouvoir le soumettre en termes de document d’instruction civique à proposer à l’information de nos élèves me semble répondre à ce souci de justice et d’égalité face au sacrifice de leur vie de ces soldats "choisis" pour l’exemple et morts, malheureusement, par la France. C’est évidemment mon voeu ! Qu’il devienne celui de l’APHG au nom de toute notre profession, en première ligne de toutes ces commémorations".
Michel Barbe - (Vice président honoraire de la Régionale d’Aix-Marseille et membre de la Commission nationale chargée du civisme.)
Annexes en pièces jointes
- Extrait du registre des délibérations du Conseil municipal de Saint Amans Soult (Tarn), 10 décembre 2014.
- Extrait du registre des délibérations du Conseil municipal de Lamillarié (Tarn), 18 novembre 2014.
VŒU du Maire de DIJON. POUR LA REHABILITATION COLLECTIVE DES FUSILLES POUR L’EXEMPLE.
"Voeu du Maire, au nom des élus de l’ensemble des groupes de la majorité municipale : réhabilitation des fusillés pour l’exemple de la guerre 14-18 et à la dénomination de la salle familiale des Valendons du nom d’Eugène Bouret.
L’année 2014 a vu l’entrée dans un cycle commémoratif exceptionnel, presque inédit, celui du centenaire de la première guerre mondiale.
Il y a des questions récurrentes, qui traversent les générations. Celle des fusillés de la Grande Guerre est l’une d’entre elles. Elle s’est inscrite dans le paysage politique et associatif dès son lendemain et constitue un volet douloureux de son histoire.
Il est de ma responsabilité de Maire d’appréhender ce sujet avec la plus grande attention. Le centenaire offre en effet le cadre propice à un nouveau débat public autour de cette question de la postérité mémorielle des soldats fusillés durant la première guerre mondiale. En France, les historiens spécialistes de la question s’accordent pour dire que c’est près de 2 400 combattants de la Grande Guerre qui ont été condamnés à la peine de mort ou aux travaux forcés à perpétuité, parmi lesquels 650, environ, ont effectivement été exécutés.
Mon souhait s’inscrit dans la continuité de l’action initiée par l’ancien Premier Ministre, Monsieur Lionel Jospin, à l’occasion de la commémoration, le 5 novembre 1998, du 80e anniversaire de l’armistice, à Craonne, lieu de terribles combats en avril 1917.
Dans son allocution, il appelait à ce que, je le cite, « ces soldats, fusillés pour l’exemple, au nom d’une discipline dont la rigueur n’avait d’égale que la dureté des combats, réintègrent aujourd’hui pleinement notre mémoire collective nationale ».
C’est bien parce que la place des fusillés dans la mémoire est aussi sensible qu’elle est difficile à aborder. Elle renvoie à une zone d’ombre de notre histoire qui a fait l’objet de controverses marquées, entre d’un côté, les tenants de l’ordre et de l’autre, les partisans d’une lecture humaniste. Au-delà d’un débat qui mettrait en cause l’honneur, la responsabilité, les pratiques d’une armée prise dans une guerre aussi particulière, réintégrer les fusillés dans la mémoire nationale, c’est bien évidemment aussi donner du sens en cette année de commémoration.
Les fusillés occupent une place particulière dans la mémoire de la Grande Guerre qui s’explique aussi par le rôle joué par les familles des victimes ainsi que des combats qu’elles ont menés pour que leurs mari, fils, frère… soient des victimes comme les autres, que l’on commémore comme les autres. Elles ont été notamment soutenues, depuis les années 1920, par des militants des droits de l’homme. De nombreuses associations d’anciens combattants m’ont saisi aujourd’hui afin d’obtenir que ceux qui furent exécutés pour l’exemple soit réhabilités pleinement, publiquement et collectivement eu égard aux excès commis par une justice d’exception.
J’ai moi-même écrit au Président de la République afin qu’il puisse examiner cette requête avec bienveillance. En conséquence, je demande, au nom des élus de l’ensemble des groupes de la majorité municipale, au Conseil municipal de la Ville de Dijon, réuni en séance plénière, d’émettre le vœu que la République prenne dans un esprit d’apaisement et de justice la décision de reconnaître les soldats fusillés pour l’exemple comme des soldats à part entière de la Grande Guerre et de les réhabiliter collectivement. Il est grand temps d’honorer nos morts, tous nos morts, et d’admettre, sans distinction aucune, qu’ils l’ont tous été pour la France.
Je vous propose également, si vous en êtes d’accord, dans un acte symbolique et solennel, de dénommer la salle familiale des Valendons du nom de l’un d’entre eux, Eugène Bouret, fusillé pour l’exemple le 9 septembre 1914 et réhabilité en 1917.
C’est notre responsabilité commune que de contribuer à la construction d’une culture de la paix et à l’éveil des consciences".
Il est procédé au vote à main levée.
Résultat du vote :
Pour : majorité
Contre : 0
Abstentions : 5
- Voeu adopté.