Ici, « Il » désigne évidemment l’opinion publique métropolitaine, souvent peu au courant des drames qui se déroulaient au-delà de la mer Méditerranée. Mais, paradoxalement, « Ils » ce sont aussi, et au premier chef, les jeunes d’alors, qui sont partis au « casse-pipe », sans presque rien connaître du monde en général, ni de l’Algérie en particulier.
Dans le film, ils sont quinze anciens « appelés » à témoigner. Entre 1954 et 1962, ils avaient à peine plus de 19 ans et habitaient, alors, à Bourg-Argental, dans la Loire. Ils ont fait partie de la centaine de jeunes de ce village, qui ont été incorporés au titre du service militaire obligatoire, pour intervenir dans un conflit qui portait à cette époque le nom « événements d’Algérie ».
La plupart ne connaissait rien de ce pays, ni des enjeux de ce combat. Ils sont passés d’un « bled » au bled, sans formation militaire adaptée. Vingt ou trente mois plus tard, ils sont revenus marqués à vie par ce qu’ils ont vu et vécu, sans aucune attention spéciale de la part des pouvoirs politiques de l’époque. Depuis, beaucoup ont gardé le silence, même auprès de leurs proches.
Les associations « Les Amis de Bourg-Argental » et « Electron Libre Compagnie », coproductrices du film, ont proposé à ces quinze anciens appelés de témoigner de la façon dont ils ont vécu cet épisode dramatique de leur jeunesse. Plutôt représentatifs de la diversité des situations personnelles, professionnelles et idéologiques des jeunes provinciaux de l’époque, ces témoignages constituent la colonne vertébrale du documentaire réalisé par Jean-Paul Julliand.
Les entretiens ont été enregistrés en août 2012, dans l’ancien cinéma du village, réveillé pour l’occasion d’un très long sommeil. Mais c’est dans ce cadre un peu désuet, que les habitants de Bourg-Argental pouvaient « voir » la guerre d’Algérie, à travers les « actualités cinématographiques ». La télévision n’a, en effet, gagné le fond de cette vallée encaissée qu’à la fin de cette guerre.
Ces interviews sont rythmées par les archives photos personnelles des anciens appelés, ainsi que par des images super 8, de paysages et d’habitants d’Algérie, tournées par un Bourguisan, à l’occasion de son service militaire. Mais là, nous sommes en 1966, soit quatre ans après la fin du conflit.
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© Jean-Paul Julliand. Tous droits réservés. Décembre 2016.
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