Découvert récemment sur un étal des puces de Perpignan, un rapport très détaillé, bien exploité par Gérard Soutadé, fait une lumière plus précise sur un drame qui s’est déroulé le 10 février 1917 au lieu-dit Roca Gelera dans le massif du Canigou. Une avalanche fit ce jour-là 12 victimes. En pleine guerre, alors que l’occupation par les allemands de la Lorraine a entrainé la recherche de nouvelles sources de minerai de fer. Ce que Gérard Soutadé expose c’est la géologie qui permet de comprendre l’exploitation minière, avec un minerai à 40 % de teneur ; un minerai que l’on doit « produire » d’abord et « exporter » ensuite vers les usines Schneider du Creusot. L’exploitation se situe dans une zone à risque, précisément décrite, et le drame est, du fait du rapport du directeur des mines et des rapports de gendarmerie, suivi pratiquement au jour le jour. Des couloirs d’avalanches que l’on connaissait, mais un état de la neige, humide et lourde qui peut expliquer que l’avalanche ait décapité une maison et emporté ses habitants.
Cette courte plaquette éditée dans la collection Patrimoine Canigo constitue une utile monographie : un départ d’avalanche « imprévisible » et le dilemme d’un directeur soucieux de ne pas trahir les intérêts de la société qui l’emploie et qui, de manière réaliste et dirons-nous aujourd’hui « cynique » déclare : « les cadavres peuvent attendre, le fonctionnement du decauville, c’est-à-dire la possibilité d’expédier le minerai vers les hauts fourneaux et les aciéries du Creusot non ». C’est du moins ce que suppose Soutadé sans pour autant stigmatiser ce comportement. À méditer, tant il est facile d’instruire aujourd’hui des procès au nom d’une morale qui ignore les « circonstances ».
© Alain MIOSSEC pour Historiens & Géographes - Tous droits réservés. 05/09/2022.
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