Journée d’étude APHG "Coup d’œil sur les politiques scolaires de la Libération aux années 2010" Samedi 20 novembre 2021, Amphi Milne Edwards, La Sorbonne

- [Télécharger l'article au format PDF]

Journée d’étude nationale de l’APHG du 20/11. "Coup d’œil sur les politiques scolaires, de la Libération aux années 2010".

Organisateurs : Jean-Noël Luc et Joëlle Alazard.
  • La Sorbonne. Amphi Milne Edwards - escalier B cour d’honneur (à l’opposé, droite, de la chapelle).
  • Inscription obligatoire en ligne : il suffit d’envoyer un mail à l’adresse inscriptionsaphg@gmail.com avant le 15 novembre.

Entre la Libération et la commotion provoquée par la crise sanitaire, l’École française connaît le plus grand bouleversement de son histoire. À partir des années 1950, le système hérité du long XIXe siècle scolaire est miné par l’élargissement social considérable de la scolarisation post-élémentaire, y compris pour les filles, le décloisonnement du premier cycle du second degré, sanctionné par la mise en place du « collège unique » en 1975, et l’intérêt croissant pour la formation de la main-d’œuvre. Les deux « explosions scolaires », au cours des années 1950-1960, puis 1985-1995, profitent notamment du développement des nouvelles filières préparant à la vie active, dans le second cycle comme dans le supérieur. La seule proportion des bacheliers par classe d’âge illustre cet avènement d’une « École de masse » : 80% en 2019, contre 26% en 1980 et 5% en 1950, avec une nette supériorité des filles, devenues majoritaires parmi les lauréats au cours des années 1970.

Parallèlement à cette expansion numérique, le système scolaire est profondément remanié dans ses structures et sa gouvernance. Disparaissent alors l’école de Jules Ferry, intégrée au « premier degré », le lycée de Bonaparte, déjà réformé un siècle plus tard et désormais banalisé par la multiplication des établissements et leur repli sur le second cycle, ainsi que les universités de la Troisième République, juxtaposant des facultés autonomes. Le pilotage de l’institution est lui aussi remodelé, par la déconcentration, depuis les années 1960, la décentralisation, à partir de 1982, puis de 2004, et l’influence du néolibéralisme, plus ou moins forte selon les gouvernements depuis la fin du XXe siècle.

Le déroulement de la scolarité et les méthodes évoluent également. La mixité se généralise à partir des années 1950. L’orientation scolaire touche, par étapes, l’ensemble des usagers du premier cycle. Le retard scolaire, l’échec et les limites du redoublement attirent de plus en plus l’attention. Relancée avant les événements de 1968, la rénovation pédagogique se poursuit temporairement dans leur sillage, puis redevient d’actualité, par moments, à partir de 1989. Introduit dans les filières technologique (1965) et professionnelle (1985), le baccalauréat n’échappe pas au mouvement, y compris dans la filière générale, où les séries sont deux fois remaniées, avant d’être supprimées en 2018.

La massification du système scolaire rejaillit sur ses personnels, dont les effectifs explosent à tous les niveaux, sur fond de féminisation croissante. La fonction enseignante est à la fois banalisée, plus complexe et davantage professionnalisée, même si les IUFM et leurs successeurs ne parviennent pas à créer une identité professorale commune, articulant autrement bagage disciplinaire et nouvelles compétences.

L’École de masse est souvent accusée de tous les maux. D’aucuns lui reprochent de saper les bases culturelles de la nation, par le nivellement des cursus, le « pédagogisme » et le recul du savoir. D’autres l’accusent au contraire d’instaurer une « démocratisation ségrégative » en préservant, contre la rénovation, des contenus et des pratiques hérités d’un système élitiste, donc inadaptés à des publics venus d’horizons sociaux et géographiques élargis, avec des cultures et des besoins spécifiques.

Les dysfonctionnements du système scolaire sont connus, comme le rapprochement insuffisant des cursus et des résultats selon les origines sociales ou géographiques et le sexe. Mais le réquisitoire ne devrait pas oublier l’ampleur du défi, quantitatif et qualitatif, de la massification, ni les contraintes subies par une institution immergée dans une société inégalitaire, connectée et fragmentée par le recul du consensus républicain laïque. Et cette institution n’est pas restée passive, comme le montrent, entre autres, les multiples dispositifs de lutte contre l’échec scolaire, l’accroissement de l’accueil des enfants « à besoins éducatifs particuliers », la valorisation de l’activité des élèves et du travail interdisciplinaire, le développement des filières techniques et professionnelles ou la participation des représentants des élèves et des parents à la vie de l’établissement. Au début du XXIe siècle, des experts considèrent toujours l’École comme la principale alliée des familles les moins dotées en ressources économiques, culturelles et relationnelles, notamment en raison de sa capacité d’intervention autonome, grâce à l’engagement quotidien d’une grande partie de ses personnels aux niveaux stratégiques de l’établissement et de la classe.

Même si la scolarisation est le fruit, depuis le début du XIXe siècle, d’une coproduction, où les acteurs locaux, dont les familles, interviennent largement, l’État a beaucoup contribué à sa progression, puis à la mise en place d’une École de masse. Par son engagement financier, des politiques volontaristes ou des mesures ponctuelles, aux retombées cependant variables selon les sujets et les époques. Cette rencontre évoque quelques-unes des décisions prises depuis le milieu du XXe siècle. Comme le cadre horaire et la profusion des réformes imposaient des choix, trois démarches ont été retenues : une vision panoramique, une séance autonome sur les questions pédagogiques, afin de rappeler leurs enjeux politiques et sociaux, des synthèses sur certaines questions essentielles. Le recours à l’histoire de l’éducation ne se limite pas, ici, à quelques allusions au début de l’étude détaillée de l’École d’aujourd’hui. On espère qu’il aidera des enseignants à mieux situer leur profession, donc une partie de leur destin, et leurs pratiques dans la longue odyssée de la scolarisation française.

Le programme

9 h. Accueil (Franck Collard, président de l’APHG) - Introduction (Jean-Noël Luc)

Première partie

Présidente de séance : Joëlle Alazard, vice-présidente de l’APHG

9h30-10h30. Héritage et toile de fond

1- Le cloisonnement scolaire sous la Troisième République (Solenn Huitric, maîtresse de conférences à l’Université Lumière Lyon 2)

2- Explosions scolaires, mixité et autres défis : le second degré pour tous et pour toutes, du Plan Langevin-Wallon au début du XXIe siècle (Jean-Noël Luc, professeur émérite à Sorbonne Université)
Discussion

10h45-12h. Changer l’École par ses méthodes ?

3- De l’innovation au lieu de mémoire : l’expérience des classes nouvelles, 1949-1952 (Alix Sébastien-Akira, maître de conférences à l’Université Paris Est-Créteil)

4- De l’accélération au blocage de la rénovation pédagogique ? Mai 68 et ses lendemains (Youenn Michel, maître de conférences à l’Université de Caen-Normandie)
Discussion

Deuxième partie

Président de séance : Pierre Caspard, Directeur du Service d’Histoire de l’Éducation (1977-2010)

13h30-14h30. Deux défis à relever par le premier et le second cycles

5- Construire le collège unique, de la réforme Haby au début du XXIe siècle (Yves Verneuil, professeur à l’Université Lumière Lyon 2)

6- « 80% d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat » (1985) ? Un nouvel élan pour l’enseignement professionnel (Stéphane Lembré, maître de conférences à l’Université de Lille)
Discussion

14h45-15h45. Deux chantiers toujours d’actualité

7- Ruptures et fluctuations dans la formation des enseignants du second degré, de la création du CAPES (1950) au début du XXIe siècle (Jean-François Condette, professeur à l’Université de Lille)

8- Le ministère de l’Éducation nationale. Décentralisation, contractualisation, mise en cohérence des politiques publiques (Tristan Lecoq, Inspecteur général de l’Éducation nationale)
Discussion

16h – Conclusion - Antoine Prost, professeur émérite à l’Université Paris 1

Pour des raisons d’effectifs, la préinscription est obligatoire : inscriptionsaphg@gmail.com
Le programme à diffuser, en PDF - APHG / DR.

© La Rédaction d’Historiens & Géographes - Tous droits réservés. 20/09/2021