Outre-Mer et frontières Une journée d’étude organisée par l’APHG de Lyon, 23 janvier 2020

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La journée du 23 janvier 2020, intitulée : « Outre-mer et frontières », s’inscrit dans un cycle de conférences annuelles portées par l’APHG de Lyon et l’Inspection académique, en partenariat avec les Universités Lyon II et Lyon III. Le laboratoire EVS-CRGA avait déjà porté les éditions 2018, 2016 et 2014 de ces mêmes journées. Ce type de manifestation vise à faire le lien entre l’actualité de la recherche et les pratiques de formation et d’enseignement du second degré.

Il s’agit donc d’assurer, par un travail de mise en lien entre champs professionnels, la mise en discussion de concepts et de notions déjà utilisés par l’enseignement, pour lesquels l’expertise scientifique des chercheurs est urgente. C’est donc la mission de formation à l’enseignement et d’examen critique des savoirs par la recherche de l’Université qui est ici valorisée.

Portée par les interventions de spécialistes reconnus de la question, de rang national voire international (dont Michel FOUCHER, professeur de géopolitique et ancien ambassadeur de France ; Nathalie BERNARDIE-TAHIR, Présidente de l’Université des Mascareignes, Jean-Christophe GAY, spécialiste français des Outre-Mer et Président géographe de l’Agrégation d’histoire), la journée sur les Outre-mers devrait ainsi permettre à l’Université Lyon III de valoriser son image auprès d’un public varié : collègues du secondaire, en poste, étudiants en préparation aux concours des deux universités de Lyon II et Lyon III, et chercheurs en géographie et en géopolitique spécialistes des aires géographiques étudiées, soit environ 200 personnes.

La journée cherchera ainsi à réfuter, tout au long des interventions, l’idée selon laquelle les Outre-Mer ne sont que des limites ou des confins, marqués par l’uniformité de situations socio-économiques précaires et pénalisés par l’éloignement de la métropole du fait de l’étendue des mers et des océans. Cette distance et cette pauvreté peuvent être en effet envisagées comme un construit géopolitique entretenu par l’État et les acteurs économiques actifs en Outre-Mer.
A l’inverse, les contributions montreront le rôle d’interface de ces territoires, à la fois du fait des dynamiques migratoires régionales dans lesquelles elles s’insèrent, mais aussi des conflits de souveraineté encore actifs entre zones économiques exclusives. De la même manière, ni les îles ultramarines, ni la vaste forêt faussement « vierge » de Guyane ne sont marquées par l’isolement : elles instaurent plutôt un rapport au monde particulier définissant « l’îléité » chère à Joël Bonnemaison.
Cette diversité ultramarine est difficilement appréhendée par la norme métropolitaine, si bien que les Outre-Mer oscillent entre des situations d’adaptation, de bricolage et d’informalité forte face au système politique national. Cette actualité critique récente, tout comme cette relecture plus fine de l’évolution socioculturelle territoires ultramarins, mérite donc amplement une mise à jour des savoirs.

Samuel DEPRAZ, APHG, Régionale de Lyon

PROGRAMME :

8h30/9h – accueil des participants

9h15 – IA-IPR, APHG, UdL : accueil institutionnel

9h30 – Samuel DEPRAZ (Université Lyon III, laboratoire EVS-CRGA) = introduction scientifique de la journée : « l’Outre-mer français, une marge entretenue ? »

Les territoires ultramarins français ont longtemps été envisagés du point de vue de leur éloignement à la métropole : indice d’isolement, espace maritime « tomogène » ont contribué à définir un « ailleurs », une marge à la fois exotique et pensée en termes de retard socio-économique vis-à-vis de la norme métropolitaine. De nouvelles problématiques de recherche, plus décentrées et plus sociales, permettent cependant de dépasser cette perspective et d’envisager une territorialité spécifique aux Outre-mer.

10h – Michel FOUCHER (Collège d’études mondiales, FMSH, Paris) = « La France et ses espaces maritimes ultra-marins : principes régaliens, réalités régionales, reconfigurations géopolitiques »

Après une longue période d’enclavement des Outre-Mers, l’insertion régionale a été partiellement assumée (notamment dans la Méditerranée américaine). La nouvelle approche, depuis 2018, valorise la puissance maritime de la France et entend mobiliser ses étendues (océans, mers et îles) face à la compétition chinoise. Un bilan et des perspectives seront proposés à la discussion.

10h30 pause-café

11h – Patrick BLANCODINI (Pr Agrégé CPGE lycée Ampère, Lyon) = « Le Maroni : la frontière invisible ? »

Après des incidents frontaliers récents avec la France, le Suriname a décidé d’in- terrompre la coopération transfrontalière, suspendant ainsi les opérations conjointes de lutte contre l’orpaillage clandestin et contre le trafic de drogue. Les incidents sont nés d’une incertitude sur le tracé de la frontière. Adossée au Maroni, celle-ci semble indiscutable et pourtant la géographie du fleuve et l’histoire de la région la rendent, à bien des égards, invisible. Quels sont les enjeux territoriaux et politiques du contrôle et du tracé de cette frontière ?

11h30 – Catherine WIHTOL DE WENDEN (Sciences Po Paris) = « Les frontières ul- tramarines : diverses, ouvertes ou fermées »

Selon le statut des territoires, les lignes de fracture des populations qui y vivent et la difficile prise en compte de leur mobilité transfrontalière, les territoires ultra-ma- rins – qui sont tous situés hors de l’espace Schengen – décrivent une mosaïque de situations. Certaines traversées des frontières semblent peu solubles comme Mayotte ou la Guyane, pour des raisons géopolitiques ; d’autres s’inscrivent dans une logique migratoire tournée vers la métropole, vers les Etats-Unis et le Canada (Caraïbes, la réunion) ou vers d’autres territoires (îles du Pacifique, Australie et Nouvelle Zélande).

12h – Pause-déjeuner

14h – Jean-Benoit BOURON (ENS de Lyon / Eduscol) = Présentation des ressources Géoconfluences sur l’Outre-mer

14h15 – Fahad Idaroussi TSIMANDA (Universités Montpellier III / Lyon III) = La vul- nérabilité socio-économique des populations migrantes à Mayotte ».

Le territoire de Mayotte, de par sa position insulaire tropicale et son relief acciden- té, est fortement exposé à plusieurs aléas. S’y ajoute, depuis les années 1990, une profonde mutation socio-spatiale liée à l’essor des flux migratoires, qui provoque une extension mal contrôlée du bâti et une pauvreté croissante de la population. L’habitat informel en « cases » gagne ainsi des zones fortement exposées, ajoutant une vulné- rabilité matérielle à la précarité socio-économique des habitants.

14h45 – Pause-Café

15h – Marie REDON (Université Paris 13) = « Frontières, interfaces et interstices dans l’espace caribéen : Saint-Martin d’un bord à l’autre ».

L’existence des territoires ultramarins français donne lieu à des effets de voisinage inédits, et parfois encombrants. Etant donnés le nombre de territoires, la multiplicité de leur statut et le compartimentage historique de cette zone, l’espace caribéen est particulièrement propice aux interfaces et donc aux interstices et aux échappatoires. Après quelques éléments généraux sur ces vieux territoires européens, nous nous attarderons sur l’île divisée de Saint-Martin, dont le passé comme la récente actualité montrent à quel point sont épineuses, et passionnantes, les formes d’ancrage de frontières ultramarines à géométrie variable.

15h30 – Jean-Christophe GAY (IAE de Nice, Université Côte d’Azur) = « L’Outre- mer existe-t-il encore ? »

L’outre-mer est une vue de l’esprit, pour un observateur placé en Europe. Sa réalité statutaire n’a cessé de s’estomper, eu égard à la logique des statuts à la carte à l’œuvre aujourd’hui. De la Réunion à la Nouvelle-Calédonie, il existe une gradation de l’altérité institutionnelle par rapport à la Métropole qui a tendance à s’éloigner de l’opposition classique entre département d’outre-mer (DOM) et territoires d’outre- mer (TOM), devenus depuis 2003 des collectivités d’outre-mer (COM). En abordant la Nouvelle-Calédonie, qui n’est ni un DOM ni une COM, nous verrons que la notion de périphéricité est relative tant l’influence de l’Australie y a été forte.

16h – discussion conclusive avec la salle

16h30 – fin de la journée

Le lieu
Université de Lyon - Grand Auditorium
92, rue Pasteur 69007 LYON

Tram T1, arrêt « Quai Claude Bernard » / Tram T2, arrêt « centre Berthelot »

 Le programme en PDF :