Marcello (Adèle d’Affry, duchesse Colonna) était une personnalité du Second Empire. Elle appartenait à une certaine classe de la société et fut par son mariage alliée à la famille des Colonna (Italie). L’exposition qui est présentée au château de Compiègne est divisée en deux parties (des couleurs permettent de situer le travail du peintre). Dans le même temps, on admirera un autre artiste, Couture, tout à fait méconnu et dont les toiles sont exposées à Amiens, Pentes (en Suisse) et Compiègne et contemporain de Marcello.
On verra avec intérêt Le baptême du Prince Impérial et des dessins, en particulier (Couture en a fait des centaines : 570 dessins). Enfin, avec ces deux expositions sont présentées des porcelaines qui font partie des réserves du musée de Compiègne. Là encore, on pourra être attentif à un ensemble de vases égyptiens tout à fait étonnants (vase de Champollion) et très modernes dans leurs finitions (par les couleurs acides …) [2]
Marcello
Peintre, elle va travailler pendant dix à douze ans en Suisse. Marie-Laure Chabannes et Cornelia Meyer sont les commissaires de l’exposition.
La trajectoire de Marcello est tout à fait particulière. Elle aurait voulu être un homme et c’est pour cela qu’elle prend un nom de peintre masculin, Marcello, et elle souhaitait également être militaire. Car elle appartient à une famille de l’aristocratie et il y avait beaucoup de militaires dans la famille.
Selon Madame Chabannes, le chiffre 4 résume à lui seul l’exposition :
– Il y a 4 femmes, Cornelia Meyer, C. Chabannes …
– 4 musées : musée de l’histoire de l’art de Fribourg, le Palais de Compiègne, le musée de Pentes en Suisse.
– 4 identités : la duchesse Colonna, la duchesse de Castiglione, Marcello, le peintre
– 4 talents : sculptrice, dessinatrice, peintre
– 4 tableaux : Charles Dafries, Louis Dafries …
Les archives sont celles de Fribourg, les dessins viennent de la fondation Marcello. Les peintures viennent donc de France, d’Italie, de Suisse...
En mars 2016 (le 8 mars), l’Université de Fribourg proposera la rétrospective de l’œuvre de Marcello.
La carrière de Marcello (1836-1879)
Après 1868, la duchesse s’éveille à sa carrière de peintre. Elle se libère de toutes les contraintes liées à l’époque et à son environnement. Sa famille est suisse mais elle fait sa carrière en France. Elle se considère comme une combattante.
Adolescente, c’est une intellectuelle qui s’intéresse à l’art et normalement, dans son milieu (mais avec l’époque également), elle est destinée à devenir épouse et mère de famille. Elle se marie donc à un Colonna qui va mourir très jeune. Elle n’aura pas d’enfants.
Entre 1857-1858, ne pouvant aller à l’école des Beaux Arts, elle décide de se former par elle-même. Dès 1863, elle expose. Son nom de famille (Castiglione) est mis en jeu. Elle reçoit beaucoup de critiques. Elle décide de prendre un pseudonyme, Marcello, un autre elle-même.
Elle sculpte de nombreux bustes. Une salle leur est consacrée. On remarquera Bianco Capello, la femme belle mais aussi maléfique (l’empoisonneuse). Marcello est une très belle femme. Elle a du pouvoir, un certain succès. Elle est invitée à la cour de Napoléon III. Les hommes la demandent en mariage…
A Paris, elle loue un atelier rue Bayard (elle a pour bailleur L. Wismer). Elle se rapproche des peintres de l’époque qu’elle admire pour certains comme Delacroix et dont elle sera une amie.
On admirera une Gorgone (qui vient du Château de Fontainebleau). La gorgone a un pouvoir mortel. La gorgone est aussi une évocation de sa vie en tant que duchesse. Elle a une vie très remplie : le matin, elle travaille à l’atelier, l’après midi et le soir elle est prise par les visites aux amis … et les bals (à la cour …)
Elle fréquente Fontainebleau, Compiègne. Elle connaît le tout Paris. Elle a des moyens financiers mais son train de vie reste modeste. Elle peint l’impératrice Eugénie… On contemplera à ce sujet un buste de bacchante épuisée qui montre la fin d’un bal (l’épuisement). On admirera encore un buste de Thiers, un de Carpeaux dont elle est proche (fils de maçon, il lui fait une demande en mariage qui est refusée mais il deviendra un ami).
En 1867, c’est l’exposition universelle. Elle part en Italie, puis va en Espagne (au Prado) et au Maroc (sur les pas de Delacroix) ; elle fera plusieurs bustes en lien avec cette époque (le cheikh abyssin). A la révolution, elle se libère psychologiquement. Elle proclame "Je suis une révolutionnaire" et "Je veux faire la sculpture de l’avenir".
En 1869, elle s’installe à Rome et crée la Pythie (Palais Garnier à Paris) et bien d’autres bustes, encore comme Liszt. La Pythie est donnée au Musée de Fribourg.
On admirera un autre buste : la gypsie, la représentation de la nature brute, de la sauvage (comme des frissons de fièvre qui traverse le corps), c’est l’époque de Charcot avec son travail sur le corps de l’hystérique. Elle provoque un choc au salon de l’exposition universelle avec ces bustes.
Puis on assiste à la chute de l’Empire. Après 1870, elle quitte l’Italie et s’installe à nouveau à Paris. Elle se raidit dans le milieu républicain. A cette période, elle va travailler avec Bonnat et Hébert. Elle rencontre Morizot (dont elle fait un portrait), Courbet… En 1879, elle écrit ses mémoires et décédera peu après.
Elle va être redécouverte dans les années 1980 par les américains (dans le cadre des gender studies). Elle intéresse d’autant qu’elle annonce le symbolisme : la femme fatale (fin du XXème siècle). Et l’Intérêt pour l’art et la musique, ancrés dans la pensée romantique... On verra aussi un dessin de crânes : vol de têtes de mort (la fête de la Toussaint), le baptême du Prince Impérial non achevé (composition de 8m/16). Elle veut introduire l’allégorie mais elle ne trouve pas sa place.
L’exposition de Couture
Couture vivait à Senlis et meurt à Marseille en 1879. En 1847, il démarre très fort (tableau dans la nef du Musée d’Orsay), il représente la charnière entre la peinture classique (Gros …) et le regard critique sur son époque. En 1848, la République lui commande l’enrôlement des volontaires.
En 1950, le musée de Compiègne a reçu un don de 170 dessins et de 40 peintures (dont le baptême du Prince Impérial). Un tableau de l’Impératrice, de l’Empereur Napoléon III, la princesse Mathilde (une proche de Marcello), le fauconnier (tableau acheté par les Etats-Unis). Victor Hugo fait son éloge. Il fait le portrait de l’Impératrice (d’après Legrée).
Puis, Couture va se tourner vers le réalisme, quittant la grande peinture historique.
Blanche Defernez pour les services de la Rédaction d’Historiens & Géographes. Tous droite réservés, 16 octobre 2015.
Les services de la Rédaction - Tous droits réservés. 26/10/2015.
Illustration en une : le Palais impérial à Compiègne - DR.